29 février 2016, 9h15, Séoul, température de l'air -2C, température ressentie -8000C...Le décor est posé. C'est en ce jour que nous prennons la direction de Busan, ville portuaire qui nous permettra de rallier le Japon. Le départ est ardu, le froid et la neige nous glacent les jambes. Quelle fricasse nom de gu! Mais nous en avons vu d'autres, et c'est bien décidés que nous regagnons la piste cyclable longeant la "Han river". Après environ 25km, nous sortons enfin de l'agglomération de Séoul et mettons le cap vers le sud en longeant la "Namhangang river". Hormis quelques secteurs recouverts tantôt de neige, tantôt de glace, qui mettent nos qualités d'équilibriste en exergue, la piste cyclable que nous emprunterons jusqu'à Daegu est de très bonne facture. Nous sommes à présent sur une ancienne voie de chemin de fer très intelligemment réaménagée pour la pratique du cyclisme. Quelques-uns crieront au génie coréen! Nous traversons ponts et tunnels ferroviaires dans ce décor non-conventionel où nous croisons de rares randonneurs çà et là. Que c'est agréable de rouler à l'écart de la circulation! Nous trouvons refuge à Yeoju pour cette première nuit hors de la capitale. Le lendemain, la température ne dépassera toujours pas les 0C. Notre but initial est Suanbo, village de montagne connu pour ses sources d'eaux chaudes.

Cependant, le froid aura raison de nous et nous obligera à revoir notre objectif à la baisse. En effet, nos dérailleurs étant gelés (!), il nous est impossible de passer les petits vitesses. Voilà qui est ennuyeux avant d'aborder quelques kilomètres de montée. Qui plus est, nous avons perdu de longues minutes en recherchant la prochaine section de la 4 rivers path. C'est donc tout naturellement que nous faisons halte à Chongju pour se mettre au chaud (un motel, encore un). Pour la petite histoire, Ban Ki Moon, secrétaire général de l'ONU, a passé toute son enfance dans cette bourgade. Le jour suivant, nous nous attaquons à cette étape qui s'annonce montagneuse avec deux cols à franchir. En chemin, nous surprennons même sur le flan d'une montagne quelque chose s'apparentant à une piste de ski. De l'autre côté de la chaîne montagneuse de Sobaek, le changement de décor est frappant: les températures redeviennent printanières, la neige s'est en allée et nous entendons des oiseaux chanter. Certains paysans ont déjà même commencé à travailler leurs champs. Le contraste avec le climat sibérien de Séoul est saisissant.

Après une nuit à Sangju, nous entamons l'ultime étape avant Daegu. Une fois la Nakdong river rejointe, nous pédalons à vive allure sur cette partie roulante qui, la plupart du temps, traverse de grandes zones rurales. Le Vietnam se rappelle à nous lorsque, à plusieurs reprises, le passage de nos roues déclenchent des aboiements nourris. Décidément, cette vieille rancoeur entre cyclistes et nos amis à quatre pattes ne semble pas s'estomper. Nous nous demandons même si le chien alpha n'est pas doté d'un détecteur à mollets, car très souvent, nous nous faisons débusquer avant même d'avoir aperçu ladite bête. Au détour de l'un des coudes du fleuve, nous apercevons au loin une bribe d'immeubles. Daegu, enfin, après quatre jours de vélos qui ne furent pas de tout repos. Cette ville, la 4ème du pays, compte 2 millions d'habitants. Nous profitons d'un jour de pause pour flâner et visiter Daegu. Comme la plupart des grosses agglomérations sud-coréennes, cette dernière possède une tour radio dotée d'une vue panoramique. On y trouve aussi un marché traditionel (Seomun market) où nous passons une bonne partie de la journée au milieu de mets aux odeurs alléchantes. A noter également l'impressionnant monorail, sorte de métro volant qui surplombe la rue.

 Le jour suivant, nous nous mettons en selle pour Gyeongju, un peu plus à l'est. Et soudain, c'est le drame. Après seulement quelques kilomètres, les craintes soulevées lors de notre arrivée à Daegu s'avèrent fondées. La petite pointe ressentie dans le genou de Patate s'amplifie et s'installe durablement. Impossible de continuer à pédaler! Le malheureux doit se résoudre à prendre le train pour finir cette étape. L'auto-diagnostique est sans appel (merci doctissimo): une tendinite rotulienne vient gâcher la fête. La commission médicale en Suisse est informée et s'occupe du dossier. Quelques visites de temples et sites historiques nous occuperont le lendemain. La ville de Gyeongju fut la capital du royaume Silla, et de ce fait, regorge de sites culturels et touristiques. A noter par exemple la présence de nombreuses tombes, sorte de petites collines éparpillées un peu partout dans les environs. Nous découvrons également une tour de pierre (Cheomseongdae) datant du 7ème siècle qui se trouve être le plus vieil observatoire scientifique de l'Asie connu à ce jour. Le jour d'après est consacré au déplacement vers Busan, en train pour l'un (repos oblige), en vélo pour l'autre (soif de découverte oblige). Les deux arriveront à bon port, l'un bizarrement plus fatigué que l'autre. Oui, car l'étape de vélo s'est avérée plus fastidieuse que prévue. Pour rejoindre Busan, il aura fallu franchir un petit col. Mais le jeu en valait la chandelle, car la vue plongeante sur la cité portuaire est de toute beauté. Nous profitons deux jours de ce lieu avec au programme les classiques visites de temples, parcs et une fois n'est pas coutume, celle d'Haeundae, plage très (trop?) prisée par les touristes lors de la haute saison. Et voilà déjà le temps de quitter la Corée du Sud. En ce 9 mars 2016, nous nous dirigeons vers le port où un ferry devrait nous emmener à Fukuoka au Japon.