C'est le cœur lourd, mais les jambes légères, que nous quittons cette magnifique région de la baie d'Ha Long pour prendre la direction de la frontière chinoise. Jennie et Lien, les deux charmantes réceptionnistes du Light Hôtel, nous gratifient de quelques photos en leur compagnie avant notre départ. Durant la première partie de notre journée, nous roulons dans un décor à croquer; en effet, de splendides pains de sucre, les mêmes que nous observions la veille sur la baie, nous accompagnent sur la terre ferme. Nous parcourons alors plus de 100km pour rejoindre la localité de Dam Ha. Étonnante cité, bordée d'une énorme avenue fantôme, sans doute construite en prévision d'un fort développement urbain futur... Nous y trouvons un petit hôtel et dormons ainsi à quelques 60km de la frontière, objectif du lendemain. Objectif atteint en début d'après-midi; c'est par la ville de Mong Cai que nous transitons vers l'Empire du Milieu. De par les idées reçues et les à priori qui nous habitaient, nous nous attendions à de nombreuses complications lors du passage de ladite frontière. Rien de tout cela! Bien que le protocole semble assez fastidieux, nous sommes pris en charge gentiment à chaque étape et tout se passe agréablement. Un examen médical nous surprend néanmoins; rassurez-vous, pas de gants en latex! On nous pointe simplement un calibre 22 sur la tempe (en fait un pistolet thermo-frontal, indiquant la température corporelle du patient en question), et on nous demande dans quels pays nous avons séjournés, souci qui reviendra ensuite auprès du préposé au contrôle d'identité, nous demandant gentiment combien de jours nous avons été "outside" (comprendre "hors de la Chine", ne manquant ainsi pas de nous rappeler que le Chinois ne sort pas forcément de son pays, et que les pays environnants sont plus ou moins sauvages à son goût )! Il nous a fallu seulement quelques hectomètres pour nous rendre compte de notre côte de popularité en Chine (grâce au Nouvelliste?); en effet l'occidental est un spécimen rare dans les régions moins touristiques du Géant qui sommeille! Un attroupement se forme aussitôt autour de Patate (premier homme à poser sa piane, de vélo, en Chine) et les photos et selfies se mettent à fuser! L'heure avançant à grand pas (deux heures pour passer les formalités d'usage ainsi qu'une heure de décalage horaire), nous voici donc à Dongxing en fin d'après-midi. Nous décidons alors de passer la nuit dans cette bourgade. Le temps pour nous de nous rendre compte du changement dans la rue; un calme relatif dû aux nombreux véhicules électriques ainsi qu'un grand respect des feux de signalisations. C'est agréable! A contrario, au chapitre des désagréments, il nous tient de relever la censure internet imposée par le gouvernement chinois (Facebook, YouTube, Google, lesconfituresdegrandmamie.ch ainsi que notre site internet, ce dernier employant une fonctionnalité de googleMap!). Mais grâce à quelques tours de passe-passe dont Patate à le secret (un VPN si tu veux tout savoir Ouash), nous arrivons par intermittence à contourner le bien nommé Great Firewall of China. Le lendemain matin, nous démarrons notre périple chinois. Les concerts de klaxons laissent place à la douce mélodie de nos 26 pouces caressant le bitume lisse. En effet, le revêtement des routes de ce côté du fleuve Ka Long (Beilun en Chinois) n'a rien à envier aux autoroutes romandes. À l'exception, peut-être, d'un raccourci que nous empruntons peu avant Fangcheng, la carte nous indiquant une jolie petite route de campagne quand la réalité nous propose une piste digne du Paris-Dakar. Il s'agit en fait de 19km d'une route visiblement en construction, offrant aux habiles vététistes que nous sommes terre ocre, caillasse et nids de poules... Quinbei nous offre le gîte pour la nuit. Comme toutes les localités que nous franchissons dans les campagnes du Guangxi, Quinbei est terne, tristounet, de par son architecture stalinienne et ses couleurs industrielles... Ceci n'empêchant pas les résidents d'être très accueillants et d'avoir en permanence une mine réjouie, contrastant ainsi avec leur environnement de vie. Désormais, notre parcours chemine à travers des petites routes secondaires, évitant la circulation des grands axes routiers et nous permettant ainsi d'apprécier la beauté rurale telles les cultures en terrasses et le décor "collineux", un petit air de Jura tropical. Et soudain, se dresse devant nous Nanning, "petite" ville de 3.5 millions d'habitants, capitale de la région du Guangxi. Nous y passerons trois nuits, notre train pour Shenzhen ne partant que lundi matin (le weekend étant bondé, notamment dû à cet éternel nouvel an chinois, se concluant par le "Lantern day"). Métropole animée: karaokés, food street, etc... Certes, mais pas tout à fait comme on pourrait l'imaginer chez nous! En effet, point de pubs, bistrots ou autres carnotzets, nous parlons ici plutôt de restaurants et de jeux prenant place dans les rues, de danses organisées dans les parcs... Bref, nous testerons une soirée à la chinoise et son karaoké, point d'orgue d'une nuit réussie dans ces contrées: salle privative, deux micros, un écran et quelques bières et c'est parti jusqu'au petit matin à s'égosiller, se rafraîchir le gosier sans se soucier de son ego lorsque nous chantons faux! Ainsi fut Nanning, que nous quittons en ce lundi matin pluvieux pour nous rendre à Shenzhen! Nos vélos, eux, sont partis deux jours plus tôt. En effet, les trains-express en Chine ne permettent pas ce type de bagages. Nous avons dû nous résoudre à les envoyer par train-marchandises. Dans cette démarche, nous avons eu à nouveau une belle preuve de la serviabilité des Chinois; un homme parlant plutôt bien anglais nous a assistés tout au long de la procédure qui aurait pu s'avérer très laborieuse sans lui, la majorité des gens ne parlant pas la langue de Shakespeare...